fbpx

L’envers de la médaille

La compétition est un univers aberrant.

Aberrant selon le Larousse :

« Qui s’écarte du type normal, qui va contre la logique, la vérité ; absurde : Idée, conduite aberrante.« 

C’est une dimension qui nous place en dehors de toute convention, en dehors de ce qui « est ».

En dehors de ce qui « est » pour la majorité d’entre nous, je parle d’une réalité collective qui dresse les contours de la norme.

La norme est la normalité pour le plus grand nombre.

La compétition nous projette bien au-delà de ce qui est possible d’avoir, d’être ou de faire.

Catégorie Bodybuilding comparaison abdos-cuisses

C’est remporter un championnat, un match, un combat, obtenir un marché ou un nouveau poste avec plus de responsabilités, plus de pouvoir, plus d’argent…

Peu importe la discipline, qu’elle soit sportive ou d’ordre « professionnel », le compétiteur ou la compétitrice est partout, dans les arts, les ordres, les affaires…

La compétition crée donc un état d’esprit survolté, égocentrique, mégalomane, difficile à comprendre si on n’a pas été soi-même un « Challenger ».

Elle nous oblige à nous extraire de notre zone de confort, à nous surpasser.

Elle crée un puissant désir de vaincre, de devenir le meilleur, l’imbattable, le numéro 1.

La compétition génère une satisfaction immense, elle est, sans nul doute, un outil de valorisation qui nous fait nous sentir vivant.

Pierre De Coubertin

C’est toujours lors de périodes compétitives que l’on passe un cap, que l’on apprend, que l’on devient une meilleure version de soi-même.

Si ce n’est une « meilleure version de soi-même », en tous cas, une meilleure version du compétiteur ou de la compétitrice que nous sommes.

L’important est de participer

Pierre de Coubertin-

Merveilleuse formule diplomatique et humaniste lorsque l’on fait du politiquement correct et qui n’a d’autres objectifs que de lisser le fondement véritable et exacerbé de la compétition.

Demandez d’ailleurs aux hommes politiques, qui sont parmi les compétiteurs les plus farouches et les plus implacables, s’ils partagent cette phrase de Coubertin.

En public certainement, ils vous en feraient l’article et seraient dithyrambiques, en privé, ils vous expliqueraient qu’ils doivent gagner, coûte que coûte et parfois même peu importe les conséquences.

Je ne connais pas un compétiteur qui soit en phase avec cette expression.

Sauf peut-être, lorsque l’on ne gagne pas…C’est je pense un moyen de légitimer la défaite.

J’imagine mal que l’on puisse s’engager corps et âme dans une compétition sans avoir le désir de gagner.

Je ne connais pas d’ailleurs un seul compétiteur véritable qui se focalise pendant des mois, voire des années, pour participer uniquement.

Combat de boxe -Faïsal Arrami

On ne prépare pas un concours, un combat de boxe, une performance quelconque avec l’idée sombre d’échouer…

…ou de ne pas gagner, cela revient au même.

C’est peut-être ce qui arrive lorsque l’on traîne ce genre d’idée… on perd.

L’investissement doit être total, envahissant, omniprésent mais fort souvent, il relègue la vie sociale et familiale au second plan.

Tout est « ego centré », c’est un état d’esprit nécessaire.

Certains vous diront à quel point ils restent sociables, à l’écoute de leur entourage et parfaitement conscients de la charge émotionnelle qu’ils « pourraient » faire peser sur leurs proches.

Ils font certainement des efforts mais ils restent furieusement focalisés sur eux-mêmes et leurs futures échéances.

Les proches qui gravitent autour de « l’astre », tels des satellites, sont toujours impactés pour le meilleur ou pour le pire…

De par mes activités et mes centres d’intérêt, j’ai toujours été plus proche des compétiteurs sportifs, plutôt que des « businessmen performers » qui sont, eux aussi, de véritables champions pour certains et qui finalement sont soumis aux mêmes émotions, à la même implication, au même choix, aux mêmes dictâtes …

Pourquoi ai-je intitulé cet article « L’envers de la médaille » ?

Parce que derrière la médaille, dans toute compétition, il y a un premier et un dernier et chacun, au départ, avait l’ambition, la seule ambition, je le répète, de gagner, de remporter le trophée, de remporter la médaille.

Il y a 30 ans

Ainsi donc, derrière la breloque tant convoitée, derrière la partie visible, le sommet de l’iceberg, existe une réalité profonde, ample et quelquefois sombre.

J’ai été moi-même compétiteur durant plusieurs années : 25 fois j’ai livré bataille pour une qualification ou un titre.

Je parle donc en connaissance de cause.

À cette époque il n’existait aucune autre discipline en musculation que le body-building.

L’expérience fut donc riche et elle a contribué à construire l’homme que je suis aujourd’hui.

Mais toutes les expériences qui vous font grandir ne le font pas sans conséquences.

La croissance peut parfois être douloureuse, c’est aussi la rançon de l’évolution.

À gravir des montagnes ou à tenter de le faire, on y laisse des plumes.

Le combat avec soi-même et avec les autres est souvent âpre.

Il y a d’abord le combat avec ou contre l’alimentation.

Après avoir suivi une alimentation hypocalorique pré-compétition pendant des semaines, voire des mois pour certains, persiste après-coup et quelquefois même après des années, une sorte de « traumatisme ».

La privation de liberté alimentaire, parce que c’est ainsi qu’il faut le voir, pour la majorité, exclu socialement et familialement.

De plus, la restriction alimentaire et calorique, (comprenez limitée dans le choix des aliments mais également hypocalorique), crée un stress métabolique qui peut quelquefois avoir des conséquences physiques et des perturbations, entre autres, sur le système hormonal.

Sans parler de la faim et des envies difficilement contrôlables qui vous tenaillent inlassablement, vous rendent irascibles et qui finissent même par vous réveiller plusieurs fois durant la nuit.

Complicité en compétition

L’expression : « qui dort dîne » n’a jamais autant sonné faux.

C’est le prix à payer pour se séparer du tissu adipeux afin qu’il n’en reste qu’un faible pourcentage et ainsi être en accord avec les critères de la discipline.

Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point, s’imposer de telles restrictions, relève d’un paradoxe psychologique, d’une sorte de schizophrénie.

Un déchirement entre soi et soi: « Je vais remanger, non je ne dois pas remanger… « 

L’entraînement, un autre combat à livrer chaque jour

Entrainement

En effet, quasiment chaque jour et pour certains, deux fois par jour, s’engagent une lutte sans merci contre la fonte.

« Contre la fonte », est une expression, vous l’aurez compris, j’inclus le travail d’intensification sur les machines, ainsi que le travail au poids de corps mais également le cardio training qui rentre, pour une part importante, dans la préparation pré-compétitive.

Cet acharnement physique, cette implication inlassable à construire un « corps parfait » ne peut connaître ni la fatigue ni la déprime malgré le travail, les obligations sociaux-familiales, le régime hypo-énergétique qui vous fait vous sentir parfois aussi las que si vous étiez grippés…

… malgré l’hypokaliémie*qui vous guette, qui elle aussi vous donne l’impression d’avoir pris 30 ans, malgré tous vos engagements du quotidien, plus vous vous enfoncez dans la préparation et plus cela devient une véritable sinécure.

*Lhypokaliémie est un trouble hydroélectrolytique défini par un défaut de potassium dans le plasma sanguin.

Mais ce n’est pas terminé, il va falloir perfectionner votre présentation en passant des heures à poser pour mettre en valeur cette musculature symétrique chèrement acquise durant toutes ces années.

Sans l’art du « posing », tous ces investissements risquent d’être vains… tous ces milliers d’heures d’entraînement et de restrictions alimentaires pour finalement passer à côté du podium.

La compétition ne rapporte rien.

Catégorie Bikini

Un point important que je dois vous préciser : les disciplines sportives tels le bodybuilding, le men’s classic, le men’s physique, le bikini…. La liste est longue, qui consistent à faire une présentation de son corps selon des critères bien établis en fonction bien sûr des différentes catégories, ne rapportent rien financièrement.

Rien ou pas grand chose ou seulement à une poignée d’élus qui sont les meilleurs professionnels au monde et qui ne sont connus que dans le cercle très fermé de ces dîtes disciplines.

Tout au contraire, à défaut de rapporter, la préparation coûte cher et peut coûter même très cher.

L’alimentation riche en protéines, nécessaire pour une part importante à la construction musculaire est forcément plus chère qu’une alimentation qui serait basée essentiellement sur les glucides ou les lipides.

La viande, le poisson, les œufs coûtent 10 à 20 fois plus cher que les pâtes ou le riz.

Les compléments alimentaires consommés trop souvent de façon outrancière représentent eux aussi un budget considérable.

Catégorie Classic

L’abonnement à la salle de sport, le coaching (alimentaire, entrainement et posing), les déplacements vers les compétitions, les cosmétiques pour préparer sa peau, le coiffeur, le maquillage, les maillots et autres connecteurs et strass particulièrement onéreux pour les femmes…

Et pour certains les produits dopants achetés à des réseaux parallèles et qui peuvent multiplier par 2, 3 voir 10 fois le budget global!

En fonction de la compétition, de son niveau, des déplacements, du temps de préparation, le budget peut représenter des milliers d’euros.

L’après compétition.

La période post-compétition est parfois difficile à gérer.

Il est compliqué d’atterrir en douceur après des semaines et même des mois exacerbés où la motivation a été un puissant moteur.

Le cadre strict, lorsqu’on se le soumet, est parfois très difficile à suivre.

Il est d’une contrainte tellement insupportable que lorsque l’on sort totalement de ce cadre, alors, on ressent une sorte de désœuvrement, une solitude, une forme d’abandon des règles qui risque de tout faire partir à vau-l’eau.

C’est pour cela que l’on voit des compétiteurs et compétitrices, dès l’échéance passée, ne plus s’entraîner, ne plus contrôler du tout leur alimentation et prendre, en l’espace de quelques semaines, un poids considérable hors de tout contrôle.

Passer d’un corps travaillé jusque dans les moindres détails, esthétique, bronzé, apprêté, à un corps gorgé de rétention d’eau et qui reprend de l’adiposité à vitesse grand V, déclenche parfois une sorte de dépression, un burn out post compétition.

Catégorie Men’s physique

D’autres gèrent parfaitement bien le retour à la « vie normale ».

Pour ceux-ci, cette période intense où son corps et son esprit ont flirté constamment avec la zone rouge, a été un marche pieds pour augmenter leurs capacités à être encore meilleur pour la prochaine compétition.

Les émotions, l’alimentation et l’entraînement sont parfaitement gérés, l’expérience aura été, dans ces conditions, d’un grand profit.

En conclusion

Je souhaiterais rendre un hommage inconditionnel à toutes ces compétitrices et ces compétiteurs passionnés et quelquefois un peu fous dont on ne connaît que la face visible de la médaille mais rarement l’envers.

Respect pour votre passion, votre abnégation et respect à votre entourage qui supporte parfois l’insupportable.

On peut ne pas être d’accord, critiquer le fondement même de ces disciplines basées sur l’esthétique et qui reposent sur un socle égoïque, mais finalement guère plus que n’importe quelle compétition de n’importe quelle autre discipline qu’elle soit sportive, politique ou dans le domaine du business.

On peut donc critiquer fortement votre égocentrisme, votre narcissisme et que sais-je encore, mais il faut un certain courage pour menez jusqu’au bout avec une grande conviction vos passions et vos rêves.

Je dédicace cet article à Jean-Marc, Marcel, Anthony, Nadine, France, Lydie…et à tous les autres, à mes vieux compagnons culturistes avec qui j’ai croisé le fer, à tous mes anciens athlètes que j’ai mené vers la victoire ou presque…

…et à tous celles et ceux que j’accompagnerai dans le futur vers des titres prestigieux ou presque.

Ce que je vous explique vous semble logique ?

Prenez le temps de réfléchir avant d’agir.

Philippe LAMACHE

Sharing is caring!

À propos de l'auteur Philippe LAMACHE

Je m’appelle Philippe LAMACHE, je suis coach sportif, coach mental, spécialisé dans l’alimentation et les compléments alimentaires pour sportifs ainsi que dans l’alimentation santé. Depuis plus de 35 ans, je coach des hommes et des femmes pour la pratique pure de la culture physique mais également pour améliorer les qualités physiques d’athlètes amateurs et professionnels, dont quelques champions, et cela dans bon nombre de sports individuels et collectifs.

>